Homélie dimanche 12/02/ Vous connaissez l’effet papillon ? Je crois que c’est Jésus qui a mis au point la théorie !

Vous avez sans doute tous entendu parler de l’effet papillon, cette théorie qui affirme que le battement des ailes d’un papillon au Brésil peut provoquer un ouragan au Texas. C’est un scientifique américain, Edward LORENZ, s’intéressant aux prévisions météo, qui a lancé cette formule étonnante dans une conférence qu’il a prononcé en 1972. En fait, c’était le titre de sa conférence, mais, lui, il mettait un point d’interrogation : le battement des ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer un ouragan au Texas ? Depuis, l’expression est souvent reprise, particulièrement dans le domaine de l’écologie, pour faire prendre conscience que chaque geste, chaque décision a des conséquences dont nous ne pouvons pas imaginer la portée.

Bien sûr, je connaissais « l’effet papillon », mais je vous avoue que je ne savais pas qui en était le père. Je l’ai appris sur un site scientifique et, désormais, vous pourrez briller dans vos conversations en reprenant tout ça ! Mais peut-être faudrait-il quand même faire œuvre de justice en signalant que c’est Jésus qui est à l’origine de l’effet papillon. Non, ce n’est pas lui qui a inventé l’expression, mais c’est lui qui a développé la théorie de l’enchainement des conséquences posé par un geste en apparence anodin. Et nous l’avons entendu dans le texte d’évangile que je viens de lire.

C’est vrai que dans une 1° écoute, on peut avoir l’impression que Jésus pousse le bouchons un peu loin. Avant, c’était le meurtre qui était puni et lui, il dit que c’est une simple colère voire une insulte qui te conduira au tribunal. Eh bien, si on appliquait à la lettre, les tribunaux devraient travailler 7 jours sur 7 et 24h sur 24 ! Mais, en fait, Jésus n’exagère pas, il parle simplement de l’effet papillon ! Il est d’un réalisme extraordinaire en nous disant : si tu n’apprends pas à te contrôler, ça finira un jour par te jouer des tours. Pendant un temps c’est une série d’insultes, puis un jour tu lèveras la main et dans une grande colère, tu risques de commettre l’irréparable. C’est l’effet papillon : une simple insulte prononcée un jour peut-être à l’origine de la surpopulation carcérale .

Mais, peut-être, que c’est dans le domaine conjugal que ce que Jésus dit est le plus parlant. Et ça tombe bien en cette messe de la St Valentin. Je précise pour ceux qui n’ont pas l’habitude de venir à la messe que je n’ai pas choisi le texte, c’est celui qui sera lu ce week-end dans toutes les églises du monde même là où on ne célèbre pas la St Valentin ! Je me permets de relire ce que Jésus disait sur ce sujet : « Vous avez appris qu’il a été dit : « Tu ne commettras pas d’adultère. Eh bien, moi, je vous dis : Tout homme qui regarde une femme avec convoitise a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur ! » Ou la la ! Et ça se complique encore après : « Si ton œil droit entraîne ta chute, arrache-le et jette-le loin de toi, car mieux vaut pour toi perdre un de tes membres que d’avoir ton corps tout entier jeté dans la géhenne. » Je traduis, la géhenne, c’est l’enfer.

Il est impossible de prendre au sérieux ces paroles si on ne connaît pas l’effet papillon. Un regard tordu peut expliquer le taux de divorce qui explose. Oui, Jésus nous met en garde, et ce n’est pas un hasard, s’il s’adresse plus particulièrement aux hommes, plus fragiles dans ce domaine, sur l’importance du regard.

Au départ, on n’y prête pas tellement attention, une belle fille passe et on la suit du regard, quoi de plus normal, me direz-vous ! Oui, mais dans l’enchainement des conséquences, ça peut devenir terrible. Parce qu’au début, bien sûr, messieurs vous ne le faites pas quand votre belle est à vos côtés et puis comme ça finit par devenir une seconde nature, au bout d’un moment vous ne vous rendez même plus compte que vous le faites en sa présence. Quand elle s’en rend compte, les premières fois, elle ne dit rien, mais n’en pense pas moins. Et un jour, après une petite goute d’eau insignifiante, en apparence, le vase va déborder et elle va vous lancer tout cela à la figure et vous, vous demanderez bien ce qui vous arrive, pourquoi une petite maladresse est à l’origine d’une telle catastrophe. Eh bien, la réponse est simple, c’est l’effet papillon ! Et Jésus n’exagère pas en parlant d’enfer car la vie de couple va vite devenir un enfer dans ces conditions.

Tout ce que je viens de dire en commentant ces paroles de Jésus peut être résumé dans un proverbe africain que j’aime particulièrement : « il est plus facile d’arracher un brin d’herbe que de déraciner un baobab ! » Si, dès le départ, tu décides de ne pas te laisser envahir par la colère, si tu ne prends pas l’habitude de proférer des insultes, ou alors quand ça arrive, si tu te donnes comme règle de demander pardon, tu ne connaitras pas les effets ravageurs de l’effet papillon. De même par rapport à ton regard, si tu décides de ne pas le laisser vagabonder sans contrôle, tu ne connaitras pas les effets ravageurs de l’effet papillon. Quand les mauvaises habitudes sont devenues comme des baobabs, il faut un miracle pour les déraciner, quand elles ne sont qu’à l’état de brin d’herbes, il est bien plus facile de les arracher.

Jésus concluait son discours par cette parole sans équivoque : Que votre oui soit oui, que votre non soit non, c’est donc une invitation à être parfaitement clairs, tout le reste vient du Mauvais ! C’est aussi ce que disait la 1° lecture : il n’y a que deux chemins possibles : « La vie et la mort sont proposées aux hommes, l’une ou l’autre leur est donnée selon leur choix. » Chacune de nos décisions nous fait avancer sur l’un des deux chemins, la vie ou la mort, et soyons bien convaincus qu’il ne peut pas exister une 3° voie. Seulement voilà, si on peut adhérer intellectuellement à l’effet papillon, si on est bien convaincu qu’il est plus facile d’arracher un brin d’herbe que de déraciner un baobab, il n’en reste pas moins que nous faisons l’expérience que ce n’est pas aussi facile que cela de nous débarrasser de nos mauvaises habitudes. On a tous envie de chanter : j’voudrais bien, mais j’peux point !

Eh bien, mes amis, bonne nouvelle, la foi, ça sert justement à ça. A tous ceux qui veulent changer de vie et qui n’arrivent pas à trouver en eux les ressources pour le faire, Dieu donne sa force. Et c’est pour cela que nous venons à la messe. Ici, c’est mieux que star wars, quand le prêtre dit : le Seigneur soit avec vous, il dit vraiment : que sa force soit avec vous ! Mais attention, en même temps Dieu nous dit : je t’entends chanter : j’voudrais bien, mais j’peux point. Moi, je peux, je peux te donner la force qui te manque, mais il y a une chose dont je veux être sûr : quand tu chantes : j’voudrais bien, c’est vrai que tu voudrais bien changer, c’est vraiment vrai ? Parce que, dit Dieu, si je peux te donner la force qui te manque, il y a une chose que je ne peux pas, c’est vouloir à ta place, c’est décider à ta place que ça a assez duré !

Maintenant, pour terminer, je voudrais préciser que l’effet papillon, on en parle surtout pour évoquer des catastrophes déclenchées par de petits actes en apparence anodins et c’est ce que j’ai fait. Mais l’effet papillon peut aussi jouer dans l’autre sens ! De petits gestes, en apparence anodins, peuvent avoir aussi des conséquences extrêmement positives. C’est ce qu’exprimait un auteur spirituel qui disait : une âme qui s’élève, élève le monde. Eh bien, ce soir, pour conclure, je veux aussi souligner le côté positif de l’effet papillon. En vous préparant au mariage, en célébrant un anniversaire de mariage, vous posez un acte d’amour qui peut sembler banal, mais je suis sûr qu’il tire le monde vers le haut. Alors, merci !

Père Roger Hébert