Homélie dimanche 4/02/2018: Que l’amour puisse avoir le dernier mot.

Hier, c’était la messe de la St Valentin chez nous, occasion de témoigner du célibat vécu dans l’amour !

Bonne semaine

Roger

 

Même si officiellement la St Valentin n’est que le 14 février, qui sera d’ailleurs le jour de l’entrée en carême, ce soir, pour nous, c’est la St Valentin. J’ai invité les fiancés qui se préparent au mariage à venir, ils recevront une bénédiction particulière à la fin de la messe et nous poursuivrons la soirée autour d’un repas que je leur ai mitonné ! J’ai aussi invité tous ceux qui fêtent un anniversaire de mariage, notamment les mariés de l’année dernière qui vont célébrer leur 1° anniversaire de mariage mais aussi ceux qui fêtent des anniversaires plus conséquents. Nous avons chaque année la présence des recordmans en la matière : 67 ans !

 

Et alors, la liturgie nous a offert pour cette circonstance un évangile qui ne manque pas d’humour puisqu’il s’agit de la guérison de la belle-mère de Pierre. Quand on parle mariage, inévitablement, on parle de belle-mère et vous connaissez peut-être le dicton de cet humoriste qui disait : le mariage ce n’est pas la mer à boire, mais la belle-mère à supporter ! Ceci dit, il existe sûrement plus de très bonnes belles-mères que des belles-mères compliquées, mais on n’en parle pas. Récemment, j’ai célébré les funérailles d’une dame âgée dont le gendre a pris la parole à la fin de la célébration pour dire qu’il souhaitait à tous les hommes d’avoir une belle-mère comme il a eu.

 

Dans l’évangile que nous venons d’entendre, Jésus guérit donc la belle-mère de Pierre. Ce texte, il est souvent cité par tous ceux qui sont contre le célibat des prêtres. Ils disent : vous voyez, Jésus a appelé des apôtres qui étaient mariés, la preuve, Pierre avait une belle-mère. Oui, c’est sûrement vrai, Jésus a appelé des hommes mariés car, à cette époque et dans cette culture, jamais le célibat n’était choisi, il n’existait que pour les hommes qui ne pouvaient pas se marier et il était plutôt le signe humiliant d’une infirmité. Mais si les apôtres étaient mariés, vous conviendrez que, jamais, il n’est question de leurs épouses dans l’évangile ce qui est sans doute le signe qu’ils vivaient dans une nouvelle forme de relations avec elles. Dans ce texte, on parle de la belle-mère de Pierre, mais, de manière très étonnante, on ne parle pas de la fille de cette belle-mère, l’épouse de Pierre. Etait elle dans cette maison ? Etait-elle encore l’épouse de Pierre ? Nous n’en savons rien.

 

En méditant cet évangile et en pensant à toutes ces controverses à propos du célibat des prêtres, il m’est venu l’idée de témoigner du sens que pouvait avoir mon célibat, celui que vivent tous mes frères prêtres. Aujourd’hui, au cours de cette messe de la St Valentin, nous célébrons la grandeur de l’amour. La grandeur et la beauté de l’amour humain vécu dans le mariage, mais je voudrais vous dire que, moi aussi, je suis devenu prêtre pour aimer. Je n’ai pas choisi de devenir prêtre en acceptant le célibat parce que j’aurais accepté de renoncer à l’amour. Quel homme pourrait vivre une vie épanouie en renonçant à l’amour ? Comment penser que quelqu’un pourrait aider ses frères à avancer sur le chemin de l’amour s’il renonçait lui-même à vivre de l’amour ? Non, je n’ai pas renoncé à l’amour, même si j’ai renoncé à une forme d’amour très belle qui est le mariage.

 

Il y a quelques temps, il y a eu une nouvelle polémique à propos du célibat des prêtres. C’est assez récurrent, ces polémiques trouvent souvent leur origine dans les déclarations d’hommes qui ont été prêtres et qui ont quitté le ministère pour se marier. C’est assez étonnant ce qui se passe chez un certain nombre de ces frères. Jamais, je ne les jugerai pour leur choix. Ils n’ont pu tenir la parole qu’ils avaient donné, l’engagement qu’ils avaient pris, chacun de nous a ses pauvretés, le Seigneur qui n’est que miséricorde pose sur eux, comme sur chaque homme, un regard de bienveillance. Mais l’attitude de certains ne manque pas de m’interroger. Un homme qui quitte sa femme parce qu’il n’a pas pu rester fidèle à l’engagement pris le jour de son mariage ne fait pas de grandes déclarations à la télé ou dans les journaux pour dire que, puisqu’il n’a pas pu tenir, c’est le signe que le mariage est une mauvaise chose ! Oui, il faut le reconnaître, le célibat est un combat pas toujours facile, mais à l’âge où nous l’avons choisi, nous n’étions plus tout à fait des gamins innocents qui ne savaient pas à quoi ils disaient oui et à quoi ils disaient non.  Voilà c’était une mise au point qui me tenait à cœur. Mais ces polémiques qui ressurgissent régulièrement au quand même du bon parce qu’elles permettent à certains de monter au créneau pour témoigner de ce qu’ils vivent en restant fidèle à l’engagement qu’ils ont pris.

 

J’avais beaucoup apprécié, dans ces circonstances, le témoignage donné par Mgr Emmanuel Gobillard, le jeune évêque auxiliaire de Lyon. Il raconte comment, quand il était en mission à Madagascar, il a connu une phase très difficile où, à cause des conditions d’exercice de son ministère, il avait du mal à trouver du sens à sa vie donnée. Et voilà qu’il va visiter Mario, un malade en train de mourir du SIDA. Je me permets de vous lire ce qu’en a dit Mgr Gobillard : Un jour, me regardant bien dans les yeux, il m’a dit : « je crois avoir compris le célibat des prêtres ! » Du tac au tac, je lui ai répondu : « Eh bien explique-moi parce que moi, je n’ai pas tout compris ! » Il a réfléchi et paisiblement il m’a dit : « quand tu es là, je me repose dans ton cœur ! » Je n’avais toujours pas compris, alors je lui ai demandé des explications. Il a ajouté : « Quand les dames de la croix rouge viennent, ce n’est pas pareil ! Elles sont mariées, elles ont des enfants et des petits-enfants, et je suis content qu’elles prennent de leur temps pour venir me voir. Je les trouve généreuses. Quand toi, tu viens, je trouve cela normal ! Il n’y a personne dans ton cœur que tu dois aimer plus que moi lorsque tu es à côté de moi. Ton cœur est libre d’être pour moi tout seul, et c’est cela qui me repose. Quand tu viens, j’ai l’impression d’être vraiment important, je sais que, au moment où tu es dans cette chambre d’hôpital, il n’y a personne qui, pour toi, soit plus important que moi. Si tu étais marié, alors je saurais qu’il y a dans ton cœur quelqu’un de plus important que moi et ce serait normal. Pareil si tu avais des enfants. Toi, non seulement il n’y a personne dans ton cœur qui sois plus important que moi, mais en plus tu as choisi cette vie. C’est une situation que tu as voulue. Cela me rend heureux. » Il avait raison, le célibat que vit le prêtre diocésain, c’est le célibat même du Christ. Tout cela nous dépasse et, bien sûr nous ne sommes jamais à la hauteur de l’exigence que ce célibat implique.

 

Voilà, en cette fête de la St Valentin et suite à la guérison de cette belle-mère, le témoignage que je suis heureux de vous offrir. Nous les prêtres, nous croyons en l’amour, nous avons voulu faire cette place dans notre cœur pour vous pour que vous puissiez croire qu’il n’y a personne que nous devions aimer plus que vous lorsque nous sommes à côté de vous. Que le Seigneur se serve de notre témoignage d’amour et du vôtre pour transformer le monde et faire en sorte que l’amour puisse avoir le dernier mot.