Homélie messe des familles: Si vous avez envie de rallonger votre prénom, j’ai une suggestion à vous faire !

Bonne semaine … dernière ligne droite avant Noël … un peu de place pour Jésus au milieu de la fièvre de tant de préparatifs !
Bonne semaine 
P. Roger

Evidemment, vous connaissez tous Jean-Marie Vianney ! Remarquez, je suis sûr qu’il y a certaines personnes à qui ce nom ne dit rien et qui, pourtant, le connaissent quand même. En effet, la plupart du temps, il est appelé le curé d’Ars. Voilà un homme qui a accompli son ministère de manière tellement exemplaire que sa personne a presque disparu, on le connaît plus par ce qu’il a fait que par ce qu’il était. Mais savez-vous que Jean-Marie, c’est le prénom qu’il n’a porté qu’une vingtaine d’années ? De fait, le jour de sa confirmation, il a décidé de rajouter Baptiste à son prénom et c’est ainsi que, jusqu’à sa mort, il signera : Jean-Baptiste-Marie Vianney.

Ce n’est pas par coquetterie qu’il a décidé d’allonger son prénom, mais il a voulu, par ce choix manifester quelle serait l’orientation de sa vie : il voulait, comme Jean-Baptiste, conduire à Jésus tous ceux qui se présenteraient à lui. Il avait été très impressionné par le fait que le Baptiste avait donné ses disciples à Jésus. Rappelez-vous : quand Jésus arrive auprès de Jean-Baptiste, celui-ci le désigne à ses disciples qui avaient pris l’habitude de l’accompagner en disant : voici l’Agneau de Dieu et ces deux-là se mettent à suivre Jésus. En souvenir de cet épisode, Jean-Marie rajoute Baptiste à son prénom pour prendre modèle sur Jean-Baptiste.

Je crois que, nous aussi, nous serions bien inspirés de prendre Jean-Baptiste comme modèle. Un indice qui nous permet de voir à quel point la figure du Baptiste est importante pour nous, c’est le deuxième dimanche de suite qu’il nous est présenté dans l’évangile. Mercredi, nous avons pris un temps de partage de partage avec ceux qui participaient au mercredi de l’Avent sur le texte que nous venons d’entendre. Je crois qu’il est d’une grande richesse pour nous aider à comprendre en quoi le Baptiste peut devenir un modèle pour nous tous.

Le texte commence par nous dire son nom : Il y eut un homme envoyé par Dieu ; son nom était Jean. Chez nous, les prénoms n’ont plus beaucoup de signification, ce sont plus les séries télé qui inspirent les parents que le calendrier des saints ! Au Burundi, j’avais été étonné de voir que souvent le prénom était choisi de manière particulière. Par exemple, tous ceux qui d’appellent Dieudonné, ont reçu ce prénom parce qu’ils étaient désirés par les parents mais la grossesse n’arrivait pas et quand elle arrive, c’est une telle joie chez ces gens qui ont une grande foi qu’ils l’accueillent comme un don de Dieu d’où le prénom : Dieudonné. En hébreu, en principe, les prénoms ont une signification, en tout cas, Jean a une signification et quelle signification : « Yehohanan » peut se traduire par « Dieu fait grâce. » Le mot grâce a une signification très riche, il veut dire tout à la fois que Dieu rend gracieux, c’est à dire très agréable ; il veut aussi dire que Dieu donne gratis et enfin que Dieu libère, gracier un détenu, c’est le libérer. Celui qui est choisi pour annoncer la venue du Fils de Dieu a donc un nom qui est tout un programme, un programme qui laisse entendre ce que fera Jésus : il rendra agréable, il rendra à chacun sa dignité d’homme et de Fils de Dieu ; il donnera et se donnera sans rien exiger en retour par pur amour enfin il libèrera tous ceux qui se trouvaient enchainés, condamnés par leurs fautes ou par les jugements des autres. En prenant le Baptiste pour modèle, voilà ce que, nous aussi, nous avons à annoncer. Nous allons célébrer à Noël Jésus qui est venu dans notre monde, eh bien voilà quel est le sens de sa venue parmi nous : faire grâce.

Le deuxième élément que nous pouvons retenir du portait du Baptiste qui peut nous inspirer, c’est le fait qu’il ne se prend pas pour ce qu’il n’est pas ! On sait qu’il avait du succès, que bien des gens venaient se faire baptiser par lui. Ce succès aurait pu lui monter à la tête eh bien ce n’est pas le cas, il est très clair : ce n’est pas lui qu’il faut attendre. Il a conscience de n’être que celui qui prépare le chemin. Et il va même préciser qu’il est la voix qui crie. On le sait, dans le prologue de l’évangile de Jean, Jésus va être désigné par ce mot étonnant : il est le verbe, c’est à dire qu’il est la Parole de Dieu, Parole qui se fait chair. Jean-Baptiste, lui, se désignera comme la voix. La voix est au service de la Parole. Quand vous avez une extinction de voix, on ne peut plus entendre vos paroles ! Eh bien, Jean-Baptiste, en se définissant comme la voix, manifeste qu’il est tout entier au service de celui qui sera la Parole, et c’est lui, la Parole de Dieu faite chair, qu’il faudra écouter. Et l’introduction du texte soulignait déjà cette humilité du Baptiste par ces mots : « Cet homme n’était pas la Lumière, mais il était là pour rendre témoignage à la Lumière. » Même si nous ne sommes pas toujours des lumières, nous aussi, nous avons à rendre témoignage à Celui qui est la Lumière venue dans notre monde. Notre monde, si souvent plongé dans les ténèbres de la violence, de l’égoïsme, réclame ces témoins de la lumière. En prenant le Baptiste comme modèle, nous vivrons donc dans l’humilité nous resterons à notre place, nous ne nous prendrons pas pour ce que nous ne sommes pas et en même temps nous comprendrons que notre place est importante car une parole a besoin d’une voix pour se faire entendre, une lumière a besoin d’être portée là où règnent les ténèbres.

Le 3° élément significatif par rapport au Baptiste que je veux retenir, c’est le fait qu’il prononce, à propos de Jésus, une parole très lourde de signification : au milieu de vous se tient celui que vous ne connaissez pas. Bien sûr, au temps de Jean-Baptiste, on peut prendre cette parole au pied de la lettre : Jésus est là et personne ne sait encore qui il est vraiment. Si, aujourd’hui, nous prenons le Baptiste pour modèle, alors cette parole prend encore tout son sens. Nous aurons toujours à rappeler que, finalement, nous ne connaissons encore pas Jésus, que nul ne peut prétendre tout connaître de Jésus parce que c’est en le fréquentant qu’on avancera dans notre connaissance. Prendre le Baptiste comme modèle, c’est donc s’engager dans une aventure qui ne sera jamais achevée, nous n’aurons jamais fini de nous émerveiller de ce que nous découvrons de Jésus à force de le fréquenter.

Enfin, il nous est dit que tout cela s’est passé à Béthanie. Ce Béthanie se situe vers Jéricho, près de la mer morte, à moins 250 mètres, dans une faille géologique. Quel symbole ! Jean-Baptiste savait que Jésus viendrait non pas pour les puissants, ceux qui visent toujours plus haut, mais pour les petits, particulièrement ceux qui sont désespérés parce qu’ils n’arrêtent pas de tomber plus bas que terre. C’est pour cela que, symboliquement, il est allé attendre le Messie à Bethanie, un des lieux habités les plus bas au monde. Jean-Baptiste, le serviteur si humble, en choisissant ce lieu manifeste jusqu’où l’humilité doit aller : descendre très bas pour rejoindre ceux qui sont tombés plus bas que terre. En conclusion, il ira jusqu’à dire qu’il n’est pas digne de délier la courroie des sandales du Messie. Enlever les sandales en déliant les courroies, c’était le travail des esclaves qui, ensuite lavaient les pieds du maître. Jean-Baptiste veut descendre si bas qu’il dit qu’il ne mérite même pas cette place.

Vous voyez que Jean-Marie Vianney, en rajoutant le nom de Baptiste à son prénom a fait quelque chose de beau et de grand. Même si nous ne rajoutons pas le nom de Baptiste à nos prénoms, prenons-le pour modèle. Ainsi, nous pourrons annoncer qu’en Jésus Dieu fait grâce, nous vivrons tout dans l’humilité, notre désir de fréquenter Jésus ne cessera de grandir et c’est ainsi que nous parviendrons à mieux le connaître, enfin, avec le Baptiste pris comme modèle, nous irons rejoindre ceux qui sont tombés plus bas que terre pour leur annoncer la Bonne Nouvelle que Jésus est venu pour eux, pour les relever, pour leur rendre leur dignité.

Je termine en disant que, si nous prenons le Baptiste comme modèle, il y aura quand même une grande différence entre lui et nous et, contre toute attente, cette différence joue en notre faveur. Jean-Baptiste, pour vivre tout ce dont je viens de parler ne pouvait compter que sur lui, sur sa force de caractère, sur sa détermination et Dieu sait si elles étaient grandes ! Nous, de ce point de vue, nous ne lui arrivons sûrement pas à la cheville, pourtant nous avons un avantage sur lui, pour vivre cela, nous pouvons nous appuyer sur la grâce que le Christ ne cesse de nous donner, sur la force du Saint Esprit répandu en nos cœurs.