Excusez-moi pour le retard ! Je n’ai pas résisté à l’appel du soleil … mais en rentrant presque 2h de bouchon sur l’autoroute !
Bonne semaine sainte !
Quand nous avons l’impression de ne pas être assez bien compris, il nous arrive de dire à notre interlocuteur : « essaie de te mettre à ma place quelques instants. » Bien sûr, il n’est jamais possible de se mettre totalement dans la peau de l’autre, mais si nous faisons quand même cet effort, nous pouvons un peu mieux comprendre ce qu’il ressent et du coup, comprendre un peu mieux sa manière de réagir.
Eh bien, c’est à cet exercice que je vous invite aujourd’hui : essayons de nous mettre à la place de Jésus. Commençons à le faire en reprenant l’évangile que nous avons entendu au début de la messe, l’évangile de l’entrée solennelle de Jésus à Jérusalem.
Nous ne sommes qu’à quelques jours de la mort ignoble que va subir Jésus, précédée de ce simulacre de procès au cours duquel tout le monde ou presque va mentir pour mieux l’éliminer. Ces derniers temps, les débats avec les chefs religieux avaient pris une tournure de plus en plus dramatique, des pièges lui étaient régulièrement tendus à partir de questions qui lui étaient posées, de situations qui lui étaient exposées. Quand Jésus revient à Jérusalem, il n’a plus aucune illusion, il sait que c’est la dernière fois qu’il entre dans cette ville, il sait très bien qu’il n’en ressortira pas vivant parce que le complot est sur le point de trouver son achèvement.
Oui, mais voilà, l’entrée à Jérusalem ne se passe pas du tout comme d’habitude. La foule est là qui l’attend, qui l’acclame et qui déroule le tapis rouge sous les pas de son âne, un tapis constitué de leurs vêtements. Dans ce moment, rien n’est trop grand pour accueillir Jésus.
Et c’est là qu’il est bon de nous mettre à la place de Jésus. Je suis sûr que ce succès ne lui a pas monté à la tête. A aucun moment, il n’a pensé : peut-être que c’est en train de marcher, peut-être qu’ils ont enfin compris qui je suis et qu’ils vont se convertir. Non, Jésus sait très bien que ces gens qui l’acclament sont des braves gens, mais qu’ils retourneront leurs vestes dans quelques jours sous la pression des autorités religieuses et politiques qui ont décidé depuis un certain temps de l’éliminer coûte que coûte.
Moi, si j’avais été à la place de Jésus, avec mon tempérament, je sais très bien ce que j’aurais fait ! Je serai descendu de mon âne et j’aurais crié que leurs manteaux, ils pouvaient les garder sur les épaules et leurs cris, ils pouvaient les arrêter que je ne voulais pas être acclamé par une troupe d’hypocrite qui bientôt hurlerait : à mort ! Crucifie-le !
Mais ce n’est pas ce que fait Jésus parce que Jésus, ce n’est pas Roger et Roger, comme nous tous, ferait bien de prendre du feu sur ce que fait Jésus !
Jésus, lui, il ne dit rien, je suis même à peu près sûr qu’il pose sur tous ceux qui l’acclament un regard d’amour. Jésus, il a compris que ces gens, c’est maintenant qu’ils sont vrais. Là, ils reconnaissent qu’il est l’envoyé de Dieu, ils le crient d’ailleurs : béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Ils ont soif de paix et d’amour et là, ils réalisent que cet homme qui a passé parmi eux en faisant le bien et en ne faisant que cela, il est vraiment celui qui peut répondre à leurs attentes les plus profondes. Dans quelques jours, quand ils réclameront la mort pour cet innocent, ils ne seront plus vraiment eux-mêmes. Ils deviendront les jouets de ceux qui les manipuleront. Du coup, jamais Jésus ne les accusera, jamais il ne les traitera d’hypocrites. Jusqu’au bout, il posera sur eux un regard d’amour implorant même pour eux tous le pardon de Dieu juste avant que la mort ne lui fasse fermer les yeux dans des douleurs extrêmes.
Encore une fois je n’ai pas trop de peine à imaginer ce que j’aurais fait si j’avais été à la place de Jésus moi qui, comme vous, supporte si mal les trahisons mais qui pourtant en fait si souvent. Nous mettre à la place de Jésus, permet de mesurer l’écart entre sa manière de réagir et la nôtre. Nous mettre à la place de Jésus nous permet de rendre grâce pour sa miséricorde inouïe parce qu’infinie, cette miséricorde qui ne cesse de nous rejoindre aujourd’hui. En effet, nous sommes bien comme la foule de Jérusalem ! Notre foi est tantôt enthousiaste, tantôt marquée par la médiocrité. Parfois même, nous aussi, nous le trahissons, tous nos péchés sont comme autant de clous qui viennent le re-crucifier. Mais sur nous, comme naguère sur ses compatriotes, il porte le même regard de miséricorde et d’espérance.
Chers amis, en ce jour des rameaux, quelles que soient les motivations qui nous ont poussées à venir à cette messe, puissions-nous être bouleversés par ce regard de Jésus qui se pose sur nous aujourd’hui encore. Puissions-nous répondre à tant d’amour par un peu plus d’amour et que cet amour se manifeste, particulièrement tout au long de cette semaine sainte, par notre participation aux différentes célébrations.
Père Roger Hébert