Homélie 2/12/2018:  Veiller dans la vigilance et l’espérance

TEXTES : Jr 33, 14-16 ; Ps 24 ; 1 Th 3, 12-4,2 ; Lc 21, 25-28.34-36

                                                                                                                                

Veiller dans la vigilance et l’espérance : tel est le maître mot du temps de l’avent que nous inaugurons en ce jour. Pendant quatre semaines, l’Eglise ne se lassera pas de nous inviter à la vigilance, en secouant nos consciences endormies et nos cœurs somnolents. Sans répit, les textes des prophètes, les avertissements des apôtres et les exhortations du Christ reprendront le même appel sur tous les tons. L’enjeu est bien grave ; car l’insouciance et la torpeur risquent de nous faire rater le rendez-vous décisif de notre vie, le passage du temps à l’éternité de Dieu.

Pour nous bousculer, Jésus prend les grands moyens. Il annonce de grands bouleversements et cataclysmes cosmiques, comme signes précurseurs de la fin des temps. Mais cette description apocalyptique n’a qu’un seul objectif, celui de rappeler à ses disciples que l’humanité est en marche vers un terme inéluctable, vers son accomplissement. Et quand basculera notre terre dans l’éternité de Dieu, il sera désormais trop tard pour changer le cours des choses. D’où la valeur du temps où Dieu nous fait signe ; un temps de choix décisifs et de vigilance active.

Redisons-le encore une fois : si notre vie est une marche vers l’éternité, il est sage de nous assurer que nous sommes dans la bonne direction et que notre véhicule tiendra la route. L’insouciance et le refus de nous mettre en cause peuvent entraîner pour nous des conséquences dramatiques.

Dans un roman célèbre au titre évocateur ” L’Inspecteur ” (le Revizor), l’écrivain russe Gogol raconte qu’une fois il fut annoncé dans une ville bien corrompue que l’administration centrale allait envoyer un inspecteur à la sévérité légendaire pour effectuer des contrôles. Toute la ville fut dans l’émoi à l’idée d’être surprise par cet enquêteur impitoyable ; et pourtant, au lieu de commencer à changer de mœurs, on décida tout simplement de guetter l’arrivée de ce visiteur indésirable et de tromper sa vigilance. Voilà qu’un jour, à la gare de train, on croit reconnaître le redoutable étranger dans la personne d’un jeune homme qui, en réalité, n’était qu’un touriste. Personne ne le prit au sérieux lorsqu’il déclara n’être pas l’hôte attendu. On le couvrit d’honneurs pour gagner sa bienveillance ; on lui montra ce que la ville avait de meilleur, et au terme d’un séjour inoubliable, il quitta la ville en bénissant Dieu pour cette heureuse méprise qui lui valut tant d’égards.

Les habitants quant à eux poussèrent un soupir de soulagement, tout heureux d’avoir trompé la vigilance du redoutable visiteur. Se croyant désormais en sécurité, ils reprirent de plus belle leurs escroqueries et leurs fraudes. Et c’est précisément à ce moment-là qu’arriva le véritable inspecteur. Le reste se devine tout seul, et personne n’aimerait être à la place de ces malheureux dupeurs dupés, pris à leur propre jeu.

Dieu est imprévisible ; ses interventions dans nos vies, tout comme sa venue certaine à la fin de notre existence ne sont pas programmables. Dès lors, la meilleure manière de l’attendre consiste à mener une vie honnête, en recherchant dans la fidélité à nos tâches quotidiennes le secret de la paix intérieure.

« Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche ».

En définitive, l’apocalypse c’est un monde qui s’écroule et un autre qui s’éveille : une histoire qui s’achève et une nouvelle qui commence : des illusions qui tombent et une espérance qui se lève. Seuls relèveront la tête ceux qui auront gardé leur cœur éveillé dans la vigilance, la prière et les bonnes œuvres.

Bonne année liturgique.