Homélie Ascension du Seigneur:  L’Ascension du Seigneur, source de jeunesse éternelle pour son Église

 

  • ANNONCER JÉSUS-CHRIST / L’ASCENSION DU SEIGNEUR A

 

1ère Lecture : Ac 1, 1-11 ; Ps : 46 (47) ; 2ème Lecture : Ep 1, 17-23 ; Évangile : Mt 28, 16-20

 

Au regard de l’Ascension du Seigneur que nous célébrons aujourd’hui, comment, tant du point de vue de Jésus que de celui des disciples, peut-on comprendre le proverbe : partir, c’est mourir un peu ? De fait, par son Ascension, Jésus part, mais c’est pour entrer en réalité dans la plénitude de vie à lui garantie par sa divinité. C’est dire qu’il part sans être touché en rien par la mort qui frappe un peu le partant, il entre dans la Gloire, et la Gloire, c’est la vie.

Au regard de ce proverbe, il faut croire que celui qui part laisse derrière lui des gens qui, à leur tour, meurent un peu eux aussi.

Dans le cas de l’Ascension, les disciples auxquels Jésus est arraché sont plutôt invités à la joie, car Jésus est toujours présent et il reviendra comme il est parti (cf. Ac 1, 11). Finalement, Jésus part-il ou ne part-il pas ? C’est là le Mystère de l’Ascension, trop profond pour qu’un proverbe en termes humains puisse en rendre compte. Laissons donc tomber le proverbe pour nous exprimer sans détour. 

 

D’abord du point de vue du Seigneur même, l’Ascension, c’est l’événement ponctuel par lequel d’une part il marque sa dernière manifestation dans son Corps glorieux, et par lequel d’autre part, il intègre définitivement sa Gloire céleste. En tant que dernier, l’événement n’est pas isolé des autres Mystères du Seigneur. C’est ainsi qu’il se trouve immédiatement lié à la Pâque comme un autre Passage qui porte celui de Pâque à la perfection en réintégrant le Ressuscité dans la Gloire céleste. Il est aussi lié lointainement au Mystère de l’Incarnation en tant que mouvement contraire, c’est-à-dire, descente de la Gloire céleste dans la condition terrestre. Mais là où la raison cède le pas à la foi, c’est que le séjour de Jésus dans la nature humaine ne correspond pas exactement à une sortie momentanée de la Gloire céleste, et pourtant la réintégration de la Gloire céleste à l’Ascension n’est pas vide de sens.

Ensuite, par rapport aux disciples, l’Ascension du Seigneur, c’est l’événement qui met fin à leur expérience mystique de voir le Ressuscité de Pâque se manifester à eux. Là encore, Le Mystère, c’est que, quand ces hommes de Galilée cesseront de rester ainsi à regarder le ciel  (Ac 1, 11) et s’en retourneront à leurs tâches quotidiennes, Jésus qui leur avait dit : je ne vous laisserai pas orphelins (Jn 14, 18), continuera d’être avec eux jusqu’à la fin des temps (Mt 28, 20). 

 

Cela veut dire qu’en considérant le Mystère de l’Ascension, on ne pourra pas se limiter à discourir sur les parties prenantes de l’événement, c’est-à-dire, Jésus et ses disciples, mais nous devons étendre la réflexion aussi sur leur postérité qui est directement l’Église. De fait dans l’Église se réalise aujourd’hui encore le Mystère de l’Ascension : Jésus ne nous apparaît plus comme aux disciples après la Résurrection, mais il tient toujours la promesse de sa présence au milieu de son Église et reste attendu au dernier jour. Toutefois, son départ est réel et comporte pour nous de véritables avantages. 

Le Seigneur, en montant au ciel pour nous laisser sur la terre, constitue pour son Église une source de jeunesse éternelle. Nous entendons que la jeunesse ou la vieillesse ne sont pas des états liés à l’âge du corps, mais à la qualité du cœur. Un homme, quel que soit son âge, qui n’a derrière lui que son passé et qui ne nourrit aucune attente pour le futur est déjà vieux. De là, on imagine ce que la jeunesse peut être, et c’est justement cette jeunesse que Jésus confère à son Église lorsqu’il monte au ciel. En effet, en montant vers son Père, il fixe notre regard sur cette destination, ou mieux, sur cette Personne qui est à la fois notre source et notre fin : le Père. Jésus nous donne le goût de le voir et mobilise nos efforts autour de la réalisation de ses promesses : je pars vous préparer une place… Là où je serai, vous serez aussi (Jn 14, 2-3). 

Sans toutefois nous distraire de notre condition terrestre, Jésus monté au ciel nous amène à relativiser tout ce qui appartient à la terre : l’honneur, la gloire, la richesse, les joies, les plaisirs de toutes les sortes, autant de choses qui nous font vieillir.  Il nous indique justement que l’homme vraiment vieux, c’est celui qui fait coïncider exactement son horizon avec celui de la terre. Il est vieux aussi parce qu’il adopte le style de vie du vieil homme, l’homme sous la domination du péché, l’homme étranger à la grâce rédemptrice du Christ, l’homme de chair vautré dans la chair vouée à la corruption. Jésus nous indique enfin que pour ne pas périr avec la terre périssable et pour y bien vivre, il faut éviter de se faire son complice, il faut à la fois en jouir, puisque Dieu l’a créée pour nous, mais savoir ne pas s’y attacher car, non seulement dans la mort nous n’emporterons rien, mais encore Dieu dispose pour nous de meilleurs biens dans les cieux. 

 

Cette tension vers le ciel est le secret de la jeunesse de l’Église et ici, j’ose dire qu’il s’agit aussi de la jeunesse d’un corps ! De fait, l’Église est un Corps nourri par les Sacrements du Christ, excellemment par l’Eucharistie du Seigneur. C’est la nourriture de vie éternelle qui, déjà sur la terre, garantit pour elle la vie qui ne finit pas, et c’est cette vie éternelle, héritage de l’Église, qui constitue sa jeunesse éternelle. En effet, à quoi sert-il d’être jeune si l’on doit vieillir et mourir ? Celui qui est jeune de la meilleure manière, n’est-ce pas celui qui est promis à l’immortalité ?

Seigneur, dès maintenant, prends-nous avec toi dans les cieux !