Homélie de Noël: C’est Lui, le Prince de la Paix, envoyé pour mettre fin au désordre du monde!

Si on veut comprendre le merveilleux message que nous a délivré la 1° lecture (le texte est en fin d’homélie), il est essentiel de connaître le contexte dans lequel a été écrit le livre d’Isaïe, au moins le passage que nous avons entendu. Le peuple de Dieu, pour une partie est en Exil ou déportation si vous préférez, à Babylone, ils sont donc très loin de chez eux. Et ceux qui n’ont pas été déportés connaissent cette situation terrible de l’occupation, l’envahisseur a pris possession du pays, il s’est installé et règne en maître absolu. Dans le pays ou en Exil, la situation est la même, le peuple est réduit en esclavage, doit obéir aux tyrans qui le gouvernent et se retrouve bien souvent en 1° ligne dans les guerres que mènent les envahisseurs. On peut dire que la situation n’est pas brillante !

Et voilà qu’Isaïe, au nom de Dieu, annonce que tout cela va bientôt se terminer. C’est le sens des expressions : « le joug qui pesait sur lui, la barre qui meurtrissait son épaule, le bâton du tyran, tu les as brisés, les bottes qui frappaient le sol, les manteaux couverts de sang, les voilà tous brûlés. » Fini l’esclavage, finie, la tyrannie, finie la guerre. On comprend que cela va susciter un grand soulagement, une grande joie : « Tu as prodigué la joie, tu as fait grandir l’allégresse, ils se réjouissent devant toi. » Et Tout cela va arriver grâce à la naissance d’un enfant : « Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné! » Et, de fait, cet enfant, étant donné son nom, était tout désigné pour mettre fin à ces désordres, à ces malheurs puisqu’on apprend qu’il s’appelle : « Prince de la Paix. »

Des siècles après, quand les chrétiens reliront ces vieilles prophéties, ils diront : bon sang, mais c’est bien sûr ! Il s’agit de Jésus ! C’est Lui, le Prince de la Paix, envoyé pour mettre fin au désordre du monde. Oui, sauf que l’esclavage, la tyrannie et la guerre sont loin d’être supprimées. Je n’ai pas besoin de vous faire une longue liste des horreurs dont on parle quotidiennement dans les journaux, à la radio ou à la télé. Il suffit de penser au drame qui s’est passé à Berlin ces derniers jours qui a réveillé tant de mauvais souvenirs chez nous. Alors, une question se pose inévitablement : Dieu aurait-il raté son coup ? La venue du Prince de la Paix a-t-elle été un échec ? Certains le pensent et disent : il est mort le prince de la Paix. Il avait peut-être de belles idées, il faisait peut-être de belles choses, mais il n’aura pu parler et agir que 3 ans et il a été mis à mort, finissant lamentablement, presque seul sur une croix.

Oui, c’est vrai, n’empêche qu’il a donné une impulsion absolument décisive au monde. Vous en voulez une preuve ? On s’est mis à compter les années à partir de cet événement. Il y a eu un avant et un après Jésus-Christ. Comme pour dire que le monde après Jésus n’a plus rien à voir avec le monde avant Jésus. Mais vous allez me dire : pourtant, rien n’a changé ! Les esclavages de toutes sortes, les tyrannies et les guerres ou le terrorisme ne se sont jamais aussi bien portés. C’est vrai aussi ! Pourtant, nul ne peut contester que l’histoire, quand elle parle de l’événement le plus essentiel, compte les années à partir de la venue de Jésus dans le monde. Ils sont nombreux ceux qui ont essayé de supprimer cette manière de faire, pensons à la Révolution Française, mais ça ne marche jamais de manière durable. Il n’est pas possible d’effacer cet événement de l’arrivée du Fils de Dieu dans l’histoire tant il aura marqué un tournant décisif.

Alors s’il y a encore des choses qui vont mal et parfois très mal comme ces temps, c’est uniquement, comme je le disais déjà il y a quelques semaines, parce que certains ont décidé de se faire complices du mal. Jésus, le Prince de la Paix, est bien venu pour éradiquer le mal. Mais, hélas, régulièrement, il y en a qui décident de se faire complices du mal pour l’aider à renaître de ses cendres. Bien sûr, parmi les complices du mal, il y a les terroristes, les dictateurs, les exploiteurs, et, comme le dit le Pape François qui est pourtant si bon, ceux-là auront à répondre devant Dieu de leurs actes. Mais hélas, ils sont bien plus nombreux les complices du mal puisque, vous et moi, nous venons rallonger la liste. Oui, tous, à certains moments, nous nous faisons complices du mal quand nous refusons le pardon, quand nos cœurs restent fermés aux appels des plus démunis, quand nous ne vivons pas dans l’amour.

Mais la Bonne Nouvelle, c’est que vous êtes là, signe que cette situation ne vous convient pas ! Vous, comme moi, nous rêvons d’autre chose que nous faire complices du mal, nous rêvons de devenir les complices du Prince de la Paix. Nous ne sommes pas venus dans cette église uniquement pour entendre des chants traditionnels de Noël, nous ne sommes pas uniquement venus par tradition. Nous sommes venus parce qu’au fond de nous, il y a cet immense désir de mettre fin à nos complicités avec le mal, de nous engager plus résolument à devenir les complices du Prince de la Paix.

Or, nous savons bien qu’il est inutile d’espérer que les autres changent, qu’ils deviennent meilleurs, si nous-mêmes nous ne commençons pas à changer. Mais dire cela, c’est immédiatement nous retrouver confrontés à un chantier énorme. Même si nous ne sommes pas des êtres épouvantables, nous voyons bien tout ce qui est à changer en nous … et si nous ne le voyons pas bien, demandons à ceux qui nous entourent de nous aider à le voir car, eux, ils voient très bien ce qu’il y aurait à changer chez nous ! J’imagine, sans peine, que nous avons même souvent essayé de changer, mais nous avons constaté que, très vite, nos vieux démons nous rattrapaient !

Chers amis, c’est pour nous que Jésus est venu ! C’est pour ceux qui ont envie que ça change en eux et autour d’eux et qui se rendent compte, en même temps, qu’ils n’ont pas les forces suffisantes pour y parvenir. Comment c’est possible ? Eh bien, s’Il est venu, il y a 2000 ans et c’est ce que nous fêtons à Noël, il vient encore à chaque messe. A chaque fois que la messe est célébrée, c’est Jésus, le Prince de la Paix, qui vient donner la force de son amour à tous ceux qui veulent devenir ses complices. Et vous savez combien il a de complices potentiels, Jésus ? Deux milliards ! Oui, il y a deux milliards de chrétiens sur la terre, donc 2 milliards de complices potentiels pour Jésus. Et même plus parce que dans les autres religions et chez les hommes sans religion, il y a aussi des artisans de paix. Mais revenons aux deux milliards, j’ai bien précisé que c’étaient des complices potentiels. En effet, au moins chez nous, dans notre vieille Europe. Beaucoup sont devenus des chrétiens tièdes. Alors que les complices du mal sont prêts à donner leur vie pour répandre la terreur, les complices potentiels du Prince de la Paix, pour la plupart, ne sont pas prêts à donner une heure par semaine pour le rencontrer !

Personnellement, je vous avoue que je célèbre la messe tous les jours, justement parce que je veux me faire complice du Prince de la Paix. Tous les jours, j’ai besoin de recevoir cette force d’amour de Jésus autrement, je me rends compte que je redeviens tiède et que je me fais plus souvent complice du mal. Alors bien sûr, tous les jours, ce n’est pas possible pou vous, mais entre tous les jours et une fois par an, il y a peut-être un juste milieu ! Vous vous imaginez ce que deviendrait le monde si les deux milliards potentiels de complices du Prince de la Paix n’étaient plus des tièdes ? Si nous voulons faire pencher la balance du bon côté, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine dans une des églises de notre pays, ces églises qui n’ont pas été construites pour devenir des monuments qu’on visite, des lieux de concert mais qui ont été construites comme des fabriques de complices pour le Prince de la Paix.

 

 

Lecture du livre du prophète Isaïe   (Is 62, 1-5)

 

 

Pour la cause de Sion, je ne me tairai pas,

et pour Jérusalem, je n’aurai de cesse

que sa justice ne paraisse dans la clarté,

et son salut comme une torche qui brûle.

Et les nations verront ta justice ;

tous les rois verront ta gloire.

On te nommera d’un nom nouveau

que la bouche du Seigneur dictera.

Tu seras une couronne brillante

dans la main du Seigneur,

un diadème royal

entre les doigts de ton Dieu.

On ne te dira plus : « Délaissée ! »

À ton pays, nul ne dira : « Désolation ! »

Toi, tu seras appelée « Ma Préférence »,

cette terre se nommera « L’Épousée ».

Car le Seigneur t’a préférée,

et cette terre deviendra « L’Épousée ».

Comme un jeune homme épouse une vierge,

ton Bâtisseur t’épousera.

Comme la jeune mariée fait la joie de son mari,

tu seras la joie de ton Dieu.

 

 

Père Roger Hébert