Homélie dimanche 03/02/2019: Aucun prophète n ‘est bien accueilli dans son pays.

MEDITATION 4èmedimanche du temps ordinaire de l’année C

Textes : L1 = Jr 1, 4-5.17-19 ; Ps = 70 ; L2 = 1Cor 12, 31-13, 13 ; Ev = Lc 4, 21-30

 

On s’attendait à une visite triomphale et c’est plutôt une violente polémique qui éclate. Le conflit a d’ailleurs failli tourner au meurtre, n’eut été l’habileté du jeune prophète qui réussit à s’échapper de justesse. Mais ce n’était que partie remise : un jour l’étau fatal finira par se refermer sur lui, sur la colline du Golgotha.

L’accueil de Jésus dans sa ville natale se solde par un cuisant échec. Dans la synagogue de Nazareth, ses concitoyens passent vite de la bienveillance à l’hostilité, choqués et déçus par ses propos remuants. Pour expliquer la mésaventure, saint Luc rapporte le dicton lancé par Jésus au visage de ses auditeurs : « Aucun prophète n’est bien reçu dans son propre pays ». Pourquoi donc ? Parce qu’on se trompe si facilement sur son identité, sa mission, ses destinataires et l’arme de son combat.

L’erreur sur sa personne.Curieusement, c’est parce qu’ils pensaient bien le connaître que les habitants de Nazareth n’ont plus finalement reconnu le Christ. Il a été méconnu parce que trop connu. De lui, ils croyaient tout connaître : sa famille, sa profession, les anecdotes sur son enfance et, naturellement, sa réputation naissante de jeune ” révolutionnaire “. On pourrait dire que c’est l’humanité du Christ qui a finalement voilé à leurs yeux son identité messianique. C’est une telle réalité que soulignera plus tard l’apôtre Paul en parlant d’une double connaissance : la connaissance selon la chair et celle selon l’Esprit (2 Cor 5,16). Connaître le Christ selon l’Esprit c’est voir, au-delà des limites de son humanité, sa divinité qui rayonne. De même, connaître un homme de Dieu selon l’Esprit c’est dépasser ses fragilités et qualités humaines pour voir en lui le messager du Seigneur.

L’erreur sur sa mission.Dans le bouillonnement socio-politique qui caractérisait le peuple d’Israël à l’époque, les foules rêvaient d’unMessie conquérant et libérateur qui, renversant l’autorité romaine, les affranchirait du joug de la servitude. En se présentant comme le Messie, et surtout en déclarant que les prophéties étaient désormais accomplies, Jésus s’inscrivait dans l’attente fiévreuse de son peuple. On comprend, dès lors, la réaction courroucée des siens qui ne voyaient nulle part les signes concrets de la libération annoncée : où donc étaient la justice et le droit alors qu’Israël continuait d’être encore soumis à l’insolente domination de Rome ? Si le temps de la libération était arrivé, comment expliquer alors que les prisons étaient encore pleines de détenus, souvent innocents ? Comment parler d’année de grâces à un peuple humilié, objet de tous les abus et meurtri par la vie ? Avouons humblement que ces questions des contemporains de Jésus, nous les adressons également au Seigneur devant les situations insoutenables de nos sociétés.

 

L’erreur sur les destinataires de sa mission.Mus par un nationalisme outrancier, les concitoyens de Jésus pensaient qu’ils allaient être les destinataires privilégiés de sa mission. Enthousiasmés par les échos flatteurs qui leur parvenaient du jeune charpentier issu de leur hameau, ils nourrissaient le rêve secret de le voir accomplir parmi eux des miracles éclatants, au grand bonheur des habitants. Mais c’est plutôt le contraire qui se produit : à cause du manque de foi des foules de Nazareth, les signes accomplis en leur faveur par le Christ sont rares. S’appuyant sur les exemples scripturaires d’Elie et dElisée, Jésus n’hésite d’ailleurs pas à déclarer que sa mission est universelle et que les païens sont parfois les privilégiés de Dieu. Dur langage pour les auditeurs du Christ qui ne cachent plus leur hostilité.

 

L’erreur sur son arme de combat.Pour établir son règne de justice et de paix, le Christ ne brandit pas les armes de la violence. Il ne cautionne aucune stratégie visant à l’élimination du pécheur ; bien plus, il n’épouse aucun patriotisme réducteur. Son unique arme de combat est l’amour, dont l’apôtre Paul décrit les caractéristiques essentielles dans la deuxième lecture de ce dimanche. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est pourtant l’amour désarmé qui triomphe du mal. Paraphrasant ce texte merveilleux, l’on a pu écrire :

 

L’intelligence sans l’amour produit la perversion

La justice sans l’amour rend intransigeant

La douceur sans l’amour rend hypocrite

Le succès sans l’amour rend arrogant.

La richesse sans l’amour rend avare

L’obéissance sans l’amour rend esclave

La beauté sans l’amour rend ridicule

La vérité sans l’amour rend blessant.

L’autorité sans l’amour fait de l’homme un tyran,

La loi sans l’amour transforme en dictateur,

La foi sans l’amour rend fanatique,

La croix sans l’amour est une torture.

Seul l’amour est digne de foi

Seul l’amour nous comble de joie

Seul l’amour nous trace la voie

Oui, l’amour est le bon choix.

Seul l’amour transforme la croix

Seul l’amour fait de nous des rois

Seul l’amour nous donne du poids.

Oui, l’amour c’est Dieu en toi