Homélie dimanche 05/03

Voilà l’homélie de ce dimanche … un peu particulière puisque c’est celle que j’ai donnée en conclusion à la semaine de retraite que je prêchais à La Flatière … semaine de grâce au cours de la quelle le Seigneur a fait un beau travail de libération pour tant de personnes.

Bonne semaine !
P. Roger

 Hier, dans mon enseignement sur le combat spirituel, je vous ai expliqué que, peut-être, ce combat avait déjà commencé au cours de cette retraite,  si se n’est pas le cas, ça ne saurait tarder ! Je vous expliquais aussi que lors d’un match de boxe,  il était très important de visionner des cassettes montrant les combats de l’adversaire que l’on devait affronter. Eh bien, on peut dire que le texte d’évangile  de ce dimanche tombe à point. Avec ce texte, nous visionnons le combat de notre adversaire que l’Écriture appelle même l’Adversaire. Vous savez d’ailleurs que, chaque année, Au début du carême, c’est ce texte d’évangile de la tentation de Jésus au désert qui nous est proposé. À force de visionner les combats de notre adversaire nous devrions donc le connaître … et pourtant, nous nous laissons encore souvent avoir !

Ce combat, entre Jésus et l’adversaire, est un véritable match de boxe. J’en visionne de temps en temps sur Facebook, grâce à un ami qui poste des vidéos. On voit souvent, avant le combat, ce moment où les deux adversaires se toisent. Je constate que c’est rarement celui qui fait le plus le malin qui remporte le combat. C’est bien ce qui va se passer dans le combat que nous voyons se dérouler sous nos yeux aujourd’hui entre Jésus et l’Adversaire. Alors, décortiquons cette vidéo du combat pour apprendre à connaître la stratégie de notre adversaire, afin de mieux lui résister.

Le premier point qui peut nous étonner c’est la mention que Jésus est conduit au désert par l’Esprit-Saint pour y être tenté. Est-ce à dire que c’est l’Esprit Saint qui est à l’origine de toutes nos tentations ? Évidemment non ! Il s’agit de bien faire la différence entre le combat de Jésus et les nôtres.

  • Pour Jésus, oui, c’est l’Esprit qui le pousse juste après son baptême qui marque le début de sa vie publique. Il est venu pour sauver les hommes, c’est le sens de son nom « Jésus » qui signifie Dieu sauve. Sa mission lui colle à la peau ! C’est donc le bon moment, il faut y aller ! Dans les matchs de boxe, on voit, quand la cloche sonne, que l’entraîneur va pousser le boxeur pour qu’il parte au combat. J’ai déjà parlé dans mes enseignements de l’Esprit-Saint comme d’un coach, c’est donc lui qui pousse Jésus au combat en l’encourageant : « vas-y, mets-le k.o. celui là, il nous a cause trop d’ennuis ! »
  • Pour nous, jamais, l’Esprit Saint ne nous conduira là où nous pourrions être tentés.  Si nous nous retrouvons dans un lieu, ou dans une situation de tentation, c’est notre manque de prudence de vigilance qui nous y aura conduit.  L’Esprit Saint pousse Jésus, nous, il nous retient ! Mais, comme la chèvre de Monsieur Seguin, nous cassons la corde en pensant que nous serons plus libres sans Lui.

Venons-en maintenant aux tentations elles-mêmes. Un autre évangile,  dit à la fin du texte : « ayant épuisé toutes formes de tentation le diable le quitta jusqu’au moment fixé. » Ce qui signifie que, dans ces trois tentations, il y a toutes les tentations,  du moins les plus fondamentales.

Première tentation : « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains » Je vous ai dit hier que le Malin se sert toujours de nos fragilités pour nous attaquer. C’est d’ailleurs pour cela qu’on l’appelle le Malin, c’est parce qu’il sait détecter nos fragilités. Jésus vient de jeûner 40 jours, le texte nous dit qu’il a faim, c’est dans cette fragilité qu’il va être attaqué. Ce que je dis là nous permet de bien comprendre la différence entre fragilité et péché.  Evidemment, Jésus n’a jamais commis de péché,  mais, étant vrai homme, il a eu des fragilités ; le fait d’avoir faim après un jeûne en est une. Le Malin profite donc de cette fragilité pour le tenter. Il lui suggère de se fabriquer son pain, de se fabriquer sa nourriture, de décider par lui-même de ce qui est bon pour lui et de se le procurer par tous les moyens. Jésus ne cède pas, Il rappelle que sa vraie nourriture, celle qui le comble, c’est la Parole de Dieu. Il renouvelle sa confiance à Dieu, son Père, en toutes choses. Cette suggestion se rapportant au pain peut nous rappeler l’épisode de la manne au désert dont nous avons parlé.  Jamais Dieu n’a pu être pris en défaut : toujours son amour est au rendez-vous. La meilleure réponse à cette première tentation est donc de renouveler notre confiance en Dieu.

La deuxième tentation : « Si tu es le Fils de Dieu jette toi en bas du Temple et Dieu te récupérera. » C’est la tentation de mettre Dieu à notre service, au service de nos projets.  L’attitude spirituelle juste, elle est énoncée par le prêtre Eli, quand il explique au petit Samuel, ce qu’il doit répondre à Dieu : « parle Seigneur, ton serviteur écoute.» Ici le tentateur nous suggère de renverser la formule : « écoute, Seigneur, ton serviteur parle ! » On veut mettre Dieu au service de nos grands projets, on compte sur sa puissance de Dieu pour nous assurer la réussite sans nous préoccuper de savoir si c’est le projet de Dieu ! Rappelons-nous la distinction que je développais entre les œuvres pour Dieu et l’œuvre de Dieu. Le Tentateur suggère donc d’utiliser la puissance de Dieu pour réaliser des coups d’éclat qui feront notre renommée, qui en mettront plein la vue aux autres !  Hélas, même dans la sphère ecclésiale, il nous arrive de céder à cette tentation. Et, dans ces cas, Dieu ne répond pas à nos demandes pour ne pas nous conduire au casse pipe, alors nous l’accusons de ne pas être fiable. Non ! Tu ne mettras pas ton Dieu à l’épreuve !

La troisième tentation : « si tu te prosternes devant moi tu auras tout »  dit le diable. C’est la tentation de l’idolâtrie. Mais nous savons bien que la promesse du diable est une escroquerie. Nous le voyons dans la première lecture. Adam et Eve se sont prosternés devant lui, mais, au lieu d’avoir tout, ils se sont retrouvés à poils ! L’idolâtrie, c’est le royaume de l’arnaque. Seulement, comme les idoles brillent, elles vont exercer une séduction qui nous fera souvent tomber.

Voilà un beau combat ! Jésus est vainqueur du premier raound.  Parce que le diable reviendra à Gethsémani, puis sur la croix, Jésus sera vainqueur à nouveau. Mais une question peut nous tarauder : pourquoi ne l’a-t-il pas mis définitivement K.O. ? Je ne sais pas, mais, ce que je sais c’est qu’il a mené ce combat pour nous, pour moi. Cette victoire, il l’a emportée pour nous, pour moi. C’est ce que Paul disait dans la deuxième lecture. Dans mon enseignement sur le combat spirituel je disais que le Seigneur ne nous délivre pas du combat mais qu’il venait à nos côtés pour combattre et nous donner la force de sortir victorieux. Je vous invite à relire ce très beau texte que l’on trouve dans le deuxième livre des Chroniques au chapitre 20 le verset 12. Le peuple des hébreux se trouve dans une situation dramatique : un armée puissante va l’attaquer mais le combat est déséquilibré, cette armée est puissante alors que l’armée d’Israël ne l’est plus. Le Seigneur adresse alors cette parole au roi Josaphat : « ce combat n’est pas le tien, mais le mien. » Paulette Boudet a écrit  un très beau livre qui porte ce titre. Appelons donc le Seigneur et appuyons-nous sur cette promesse énoncée dans le 2° livre des Chroniques : « Seigneur ce combat ne peut pas être le mien, il est le tien, alors, combats avec moi, combats pour moi. »

Je termine en citant un proverbe africain qui peut nous être utile dans notre lutte contre les tentations et qui aurait pu être une belle explicitation de ce que veut nous dire la première lecture si j’avais eu le temps de développer un commentaire sur cette lecture. Les africains aiment dire : « il est plus facile d’arracher un brin d’herbe que de déraciner un baobab ! » Ça paraît évident !  Alors, occupons nous de la tentation pour l’éliminer tant qu’elle a la taille d’un brin d’herbe,  autrement elle nous submergera.