Bon dimanche, bonne semaine !
Roger
PS : je vends toujours ma voiture !
Je ne sais pas si c’est votre cas, mais moi, j’aime beaucoup l’apôtre Pierre. C’est vrai que, parmi les apôtres, il y en avait un qui était plus sérieux, plus appliqué, plus fiable, même, c’est Jean, mais ce n’est pas lui que Jésus a choisi pour diriger la barque de l’Église. Il a choisi Pierre, vous m’excuserez l’expression, Pierre, il est un peu grande gueule. C’est lui qui monte très vite au créneau : « Seigneur, s’ils t’abandonnent tous, tu peux compter sur moi, je te resterai fidèle jusqu’à la mort ! » On sait ce qu’il en sera de la fidélité de Pierre, prenant peur d’une femme, dans la cour du palais du grand-prêtre, il reniera Jésus par trois fois ! Mais malgré tous ses défauts, toutes ses limites, qu’est-ce qu’il est attachant ! L’évangile d’aujourd’hui nous le présente comme je l’aime.
Vous avez entendu : Jésus a demandé à ses apôtres de le précéder sur l’autre rive du lac, lui, n’est pas pressé d’y aller, après avoir renvoyé les foules, il prend un bon temps de prière. Quand il se rend compte que la barque est déjà loin, Jésus, pour la seule et unique fois de tout l’évangile va mettre sa puissance à son service et marcher sur les eaux pour rejoindre plus vite ses apôtres. Le texte nous dit que la barque était chahutée par les vagues car le vent était contraire. Pour ces pécheurs aguerris, cette petite tempête n’est pas inquiétante, ils en ont vu d’autres ! Par contre, quand ils se rendent compte que quelqu’un est en train de les rejoindre en marchant sur les eaux, là, ils ont vraiment peur, ils pensent même voir un fantôme. Jésus cherche à les rassurer et c’est là que Pierre se révèle tel qu’il est, tel que je l’aime. « Si c’est bien toi, Seigneur, ordonne que je vienne te rejoindre en marchant moi aussi sur les eaux. » Et Jésus le prend au mot : viens ! Pierre ne peut plus se défiler, tous les autres le regardent, il ne veut pas passer pour un dégonflé, alors il y va ! Il sort de la barque et ça marche, c’est le cas de le dire, puisqu’il marche sur les eaux.
J’aime ce coup d’audace de Pierre. Quand Jésus le voit faire un tel coup d’audace, il ne doit pas regretter de lui avoir confié la barre de l’Église ! En marchant sur les eaux, comme Jésus, il me semble que Pierre a appris deux choses fondamentales qu’il nous serait bon de retenir à notre tour.
– La première chose que Pierre apprend, c’est que être croyant, c’est oser faire le plus souvent possible des coups d’audace et des coups d’audace, j’oserais dire, de plus en plus audacieux. Dans ce qu’il est convenu d’appeler le discours d’adieu, dans l’évangile de St Jean, Jésus dira : « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera aussi les œuvres que je fais et il en fera même de plus grandes ! » Avant d’avoir entendu ces paroles, Pierre les met en application quand il demande à Jésus : permets que je puisse faire les mêmes œuvres que toi ; je veux, moi aussi, marcher sur les eaux. Peut-être se souviendra-t-il de son coup d’audace quand, après la résurrection et même après la Pentecôte, il rencontrera, avec Jean, un boiteux assis en train de mendier à la Belle Porte du Temple, il lui dit : De l’or et de l’argent, je n’en ai pas, mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus, lève-toi et marche ! Il est intéressant de lire la suite du ministère de Pierre, telle qu’elle est racontée dans le livre des Actes des Apôtres comme une série de coups d’audace. Pierre a osé croire, malgré sa faiblesse, ses insuffisances, que Jésus pouvait le rendre capable d’accomplir les mêmes œuvres que lui.
A la suite de Pierre, nous sommes invités à croire qu’un chrétien, un vrai chrétien, c’est celui qui, en permanence, ose faire ces coups d’audace qui consistent à demander à Jésus qu’il nous permette de faire les mêmes œuvres que lui. En effet, quand Jésus a dit : « celui qui croit en moi fera aussi les œuvres que je fais ! » cette parole s’adressait à tous ceux qui décideront de croire en lui. Alors, évidemment, ne nous méprenons pas, vouloir faire des coups d’audace, ça ne consiste pas à vouloir réaliser des coups d’éclat pour épater la galerie et faire grandir notre popularité ! Je pense que le plus grand coup d’audace que nous puissions réaliser, c’est de demander à Jésus qu’il nous permette d’aimer, au quotidien, comme lui, il aimait sans jamais se lasser, sans choisir ceux qu’il voulait aimer et ceux qu’il refusait d’aimer, en accordant son pardon à tous ceux qui l’avaient déçu … Oui, aimer comme cela, ça nous dépasse totalement, pourtant c’est ainsi que Jésus aimait, alors, demandons lui de nous permettre de faire les mêmes œuvres que lui.
– La deuxième chose que Pierre apprend, c’est que, pour que le coup d’audace réussisse, il y a une condition bien précise. Pierre marche sur les eaux comme il l’a demandé à Jésus mais voilà que, subitement, il se met à couler. Est-ce à dire que, lorsque Jésus communique sa puissance, elle est limitée ? Non, pas du tout ! Mais le texte d’évangile explique ce problème de la manière suivante : « voyant la force du vent, Pierre eut peur. » Le texte grec est encore plus suggestif puisqu’il dit : » regardant le vent, Pierre eut peur. » C’est étonnant cette expression : regardant le vent ! Mais ça signifie que, jusque là, Pierre avait tellement conscience que le coup d’audace qu’il avait demandé dépassait ses capacités qu’il ne lâchait pas le regard de Jésus en marchant sur l’eau comme pour lui dire : si tu m’abandonnes, je suis foutu ! Mais Jésus n’abandonne jamais ceux qui osent ces coups d’audace … par contre, c’est Pierre qui a abandonné le regard de Jésus et c’est ce qui l’a fait couler. A un certain moment, le vent a dû être un peu plus fort, alors Pierre regarde les vagues et finit par se demander s’il va tenir longtemps. Pauvre Pierre ! S’il tenait ce n’est pas parce que la mer n’était pas trop agitée, s’il tenait c’est parce que Jésus le faisait tenir. Mais la foi de Pierre connaît un coup de mou, voyant toutes les difficultés, il lâche le regard de Jésus pour ne voir plus que les difficultés, le résultat ne se fait pas attendre : il coule !
Il en va de même pour nous. Quand nous traversons des difficultés, voire des tempêtes, si nous ne lâchons pas le regard de Jésus, si nous gardons nos yeux fixés sur lui, dans une confiance à toute épreuve, nous ne coulerons pas. Les difficultés ne disparaitront pas forcément, Jésus n’est pas un magicien, mais elles ne nous engloutiront pas. Et comme c’est important de le savoir car, lorsqu’un chrétien décide d’oser des coups d’audace, il risque vite d’être confronté à un certain nombre de difficultés qui pourraient le décourager. Mais c’est précisément dans ces moments-là qu’on va expérimenter l’incroyable puissance de Jésus. Non seulement, il nous a pris au mot quand on lui demandait de faire les mêmes œuvres que lui, mais en plus, il est capable de nous faire tenir le cap même quand nous sommes affrontés aux pires tempêtes. Trop fort Jésus, comme disent les enfants !
Le fait de savoir tout cela ne nous empêchera pas de couler encore un certain nombre de fois. Mais ne craignons rien car, pour nous, comme pour Pierre, Jésus étendra la main pour nous saisir et nous faire asseoir auprès de lui. Quand il dit à Pierre : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? Je ne peux pas imaginer un seul instant qu’il prononce ces paroles sur le ton du reproche, parce que Pierre devait trembler de tous ses membres d’avoir failli se noyer et d’être complètement trempé alors qu’il n’y a plus de soleil. Par ces paroles, Jésus est en train de le rassurer comme on rassure un enfant en lui disant : ça y est, c’est fini, tu ne risques plus rien. Et c’est aussi de cette manière que Jésus agit avec nous. Jamais, il ne nous fera de reproches, il aurait bien trop peur que nous n’osions plus tenter ces coups d’audace qui nous permettent de faire les mêmes œuvres que lui.
Père Roger Hébert