HOMÉLIE IVème DIMANCHE DE L’AVENT C.

QUATRIEME DIMANCHE DE L’AVENT C.
Première lecture : Mi 5,1-4 Psaume
responsorial : 80(79)
Deuxième lecture : He 10,5-10
Evangile : Lc 1,39-45.

Le titre qui convient au passage de l’Evangile de ce quatrième dimanche de l’Avent, c’est la Visitation. Je fais  remarquer immédiatement que le terme Visitation est un néologisme et que la réalité qu’il recouvre est identique à ce qu’indique le terme bien connu de visite : une personne quitte sa maison pour aller saluer une autre chez elle… retrouvailles, salutations enthousiastes, effusion de joie.
C’est bien d’une scène de visite qu’il s’agit dans cet Evangile. L’appeler “visitation”, c’est lui reconnaître un caractère unique. De même qu’est unique la Naissance du Seigneur désignée par le terme “Nativité” ; de même qu’est sans parallèle l’annonce de l’Ange Gabriel à Marie et qu’elle est appelée “Annonciation”, ainsi se présente la visite de Marie à Elisabeth, avec une singularité telle qu’elle doive s’appeler “Visitation” dans le jargon théologique. Reste à repérer cette particularité au niveau du Promoteur et des acteurs de la scène.

Le promoteur de la scène de la Visitation, c’est l’Esprit Saint. Il n’est pas mentionné au début du passage, mais c’est lui l’initiateur de la scène de l’Annonciation qui précède immédiatement celle de la
Visitation. L’Ange Gabriel révèle à Marie l’action de l’Esprit en elle : l’Esprit viendra sur toi… et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre. De plus, l’Annonciation est la cause de la Visitation, car c’est suite à l’Annonciation que marie prend la décision d’aller rendre visite à sa cousine Elisabeth qui, à son tour, répond au rendez- vous du Saint-Esprit. Il sera intéressant maintenant de voir le rôle que l’Esprit jouera sur chacun des acteurs de la Visitation.

En premier lieu, sur Marie à la Visitation. La décision que prend Marie d’aller rendre visite à Elisabeth ne s’explique pas par une volonté humaine. Le monde serait plein de Visitations si pour la
réaliser, il suffisait de deux femmes désireuses de se rendre visite l’une à l’autre pour parler ! Dans le cas de la vraie Visitation, l’intervention de l’Esprit au niveau de l’une et de l’autre change tout. Marie est propulsée sur les hauteurs de Judée par une certaine hâte qui n’est pas faite d’agitation stérile, mais du même zèle qui fait sortir les Apôtres du cénacle au jour de la Pentecôte. Et c’est l’Esprit qui fait que la visite devient Visitation à cause de son caractère exceptionnel et unique.

Le même Esprit agit sur Elisabeth. Elisabeth nous est successivement révélée comme épouse de Zacharie (cf. Lc 1,5), à l’occasion de l’Annonciation au prêtre dans le Temple, et comme cousine de Marie (cf. Lc 1,36) à l’occasion de l’Annonciation à Marie, donc à l’occasion de grandes manifestations de l’Esprit Saint. C’est ainsi qu’à la Visitation, Elisabeth entre dans la danse de l’Esprit et que l’Evangile dit d’elle qu’ elle fut remplie de l’Esprit Saint et s ’écria d’une voix forte… Et pourquoi doit-elle s’écrier d’une voix forte ? – Parce que l’Esprit est lumière, vérité et transparence et il n’y a que le mensonge qui se murmure dans les ténèbres. L’Esprit fait en sorte que l’accueil réservé par Elisabeth à Marie ne relève pas de la simple hospitalité humaine. Même si la théologie ne recourt pas à un autre néologisme pour désigner cette hospitalité, il faut l’entendre comme un mystère un cran au-dessus de celui de l’hospitalité d’Abraham (cf. Gn 18,1-7). En effet, comment Marie et Elisabeth peuvent-elles manquer de s’attirer et de s’accueillir alors qu’elles jouissent toutes les deux des merveilles de Dieu, l’une de la conception
virginale, l’autre de l’obtention d’un enfant dans sa vieillesse, comme Sara (cf. Gn 21,1-7). Comment se repousseront-elles si elles accueillent chacune de son côté les faveurs du Très-haut avec esprit d’humilité ? L’Esprit fait d’Elisabeth une prophétesse dans son exultation et dans ses paroles d’accueil où elle profère la première béatitude : heureuse celle qui a cru à l ’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. Et l’œuvre en elle de l’Esprit se sent jusque dans son sein où tressaille de joie l’enfant qu’elle porte.

En troisième lieu sur Jean-Baptiste auquel l’Esprit fait exécuter dans le sein maternel une danse sacrée comme David devant l’Arche en procession vers les portes de Jérusalem (cf. 2 S 6,14). Et surtout, c’est l’Esprit qui orchestre cette rencontre de Dieu et de l’homme à travers ces deux enfants à naître, pardelà leurs mamans adultes.

Et maintenant, qui me dira que ce n’est pas là une mini-Noël ou une Noël anticipée ? Il se fait que la maison de Zacharie se trouve transformée en un vaste sanctuaire recouvrant avant la date la grotte de Bethlehem, ou encore abritant en elle la plus ample cathédrale du monde, le sein de la Vierge Marie portant en elle le Fils du Très-Haut. Jamais pareil bonheur n’est tombé sur une maison d’homme où Dieu et l’homme se donnent un rendez-vous d’amour pour que l’homme soit sauvé ! Jamais l’humanité ne s’est trouvée si proche de son salut ! Et c’est cela même qui donne à la Visitation une haute signification tant comme événement que comme intervenants.

S’il n’y a pas de hasard au niveau du déroulement de la Visitation, il ne peut y en avoir au niveau du choix de ces textes pour le quatrième dimanche de l’Avent. Par là, Mère Eglise nous invite déjà à entrer dans la joie de Noël, à ouvrir nos cœurs pour recevoir la grâce de la Rédemption offerte au monde par Dieu, dans une merveilleuse collaboration de sa Trinité Sainte avec des hommes du passé choisis par son Amour. C’est nous les hommes du présent qu’il choisit pour jouir de ce salut et pour le diffuser au monde par notre joie et l’exemple de nos vies. Laissons-nous visiter par la grâce du Christ.